Si Dr Pepper est quasi inconnue (en tout cas très confidentielle) en France, c'est une marque très forte aux USA et c'est notamment la plus ancienne marque de soda. Marque du groupe Coca-Cola, habituellement référence en matière d'excellence marketing, elle a pourtant fait les frais d'une dérive des réseaux sociaux.
L'histoire se passe avant l'été au Royaume Uni, sur la page locale de la boisson: Dr Pepper Facebook UK (plus de 200 000 membres). Pour animer cette page, le service marketing et son agence ont utilisé un des "musts" de Facebook, sur la base de Hijacking (poster des statuts saugrenus sur les murs de ses relations): Status Takeover. Avec cette appli, Dr Pepper poste sur votre mur des statuts aléatoires et a priori embarassants sur la base de "Quelle est la pire chose qui pourrait vous arriver?". BINGO! Plus de 150 000 fans ont participé.
L'inconvénient avec les Réseaux Sociaux, c'est que le succès n'est pas toujours maîtrisé et que les dérapages sont rapides et pas toujours maîtrisés. Une mère découvre par hasard sur le mur de sa fille de 14 ans, un lien vers une vidéo porno particulièrement trash, avec le commentaire: " J’ai regardé 2 Girls 1 Cup et ça m’a donné faim". Heureusement, le filtre parental a bien fonctionné. Horrifiée, et c'est compréhensible, la mère contacte aussitôt Coca-Cola qui lui offre 2 places de théâtre et une nuit d'hôtel à Londres. Si l'histoire s'était déroulée il y a 15 ans, il y aurait eut (et encore) un encart dans le journal local et on n'en aurait pas entendu parler. Mais, avec les Réseaux Sociaux, il a suffi que la mère aille raconter son histoire sur le forum des parents pour les parents Mumsnet ("Need help with a very sensitive complaint against a massive multinational!"), pour que l'affaire prenne d'autres proportions. D'autant que la multinationale a essayé de se dédouanner en disant que ces opérations sont gérées par des agences extérieures et que leur responsabilité juridique ne saurait être engagée.
Mais, avec plus de 1000 commentaires en moins d'une semaine, Coca-Cola a décidé de retirer l'appli et les statuts. Un message est posté le 18 juillet pour annoncer la fin anticipée de l'opération. Donc, bonne gestion de crise, comme ce doit être le cas sur les Médias Sociaux: rapide, adapté et efficace; même si la presse ne s'est pas privée de relayer l'opération:
Telegraph: Coca-Cola accused of using porn to target children on Facebook
Guardian: Coca-Cola forced to pull Facebook promotion after porn references
Mais la marque aurait pu encore mieux faire en utilisant les "restrictions liées à l'âge" dans le montage de son opération.
Peut être que Coca-Cola a pris peur suite à la mésaventure de Nestlé avec ses barres chocolatées Kit Kat. Il faut dire que pour le géant suisse, ce n'est pas une simple mère qui a posté sa mésaventure sur un forum, mais Greenpeace qui a attaqué. L'organisation écologique a en effet publié une vidéo assez violente pour condamner la déforestation en Indonésie, les menaces sur les populations et sur les Orangs-Outans dont Nestlé se rendrait coupable pour cultiver l'huile de palme nécessaire à certaines confiseries, Kit Kat notamment.
Comme on est sur Internet, Greenpeace a même réalisé un minisite qui reprend sa campagne, sa vidéo, le logo détourné… Vous avez besoin d'une pause Kit Kat, la forêt aussi.
Greenpeace, habitué aux coups de force pour faire passer ses messages ne s'est pas arrêté là. Les utilisateurs de Facebook, se sont jetés sur la page du groupe, pour la submerger de messages hostiles liés à cette campagne et à l'avenir de la planète.
Et là, la réaction de Nestlé met "le feu aux poudres" en demandant tout d'abord de ne pas publier de messages avec le logo détourné (sinon ils seront supprimés). Premières réactions à chaud des insternautes qui condamnent cette réponse. En réponse, les services de Nestlé montrent qu'ils n'ont pas compris le principe de fonctionnement des Réseaux Sociaux: "C'est notre page, nous décidons des règles". Les Médias Sociaux, c'est justement l'inverse. Même si on y parle des marques et de leurs produits, même s'il y a un modérateur, ces espaces sont pour les consommateurs. Ce sont eux qui en définissent les règles. Et contrairement à Coca-Cola qui est intervenu un dimanche pour arrêter son opération, les messages sont tombés sur l'espace de Nestlé pendant un weekend, sans personne pour répondre. Les internautes n'attendent pas les horaires de bureau pour s'exprimer.
Que faire?
En réaction:
Eviter la politique de l'autruche.
Eviter de fuir.
Eviter de nier.
Assumer.
Communiquer.
En prévention:
Une marque sait sur quels points elle peut être attaquée. De même qu'on ne fixe pas ses prix aux dés ou qu'on ne se lance pas dans une interview sans préparation; on ne se jette pas dans les réseaux sociaux à la légère. La démarche "Social Media" ne s'improvise pas. Elle se prépare, que ce soit avec un Community Manager interne, avec un spécialiste externe ou avec une agence.
Donc avant de se lancer, on prépare sa gestion de crise potentielle et les réponses à y apporter. D'une part avec une charte et d'autre part avec des réponses pertinentes, rapides, adaptées et efficaces sur les différentes attaques dont on peut être l'objet.