On dit / on lit que les personas sont un passage obligé du marketing. Pourtant, sur le sujet, le pire côtoie le meilleur. Dans certains cas, les personas sont l’un des éléments qui est à l’origine du succès d’une campagne. Mais bien souvent, c’est du grand n’importe quoi. Les efforts déployés et les moyens humains et financiers investis n’apportent aucun résultat, ou très loin de ceux espérés.
“Persona” n’est pas une garantie de succès. Eléments de réflexion.
En marketing, notamment digital et en particulier BtoB, tout le monde parle de persona. Celui qui n’aborde pas le sujet risque de passer pour incompétent. Persona, c’est à la fois un “must have” et un “need to have”. A la limite, peu importe ce qu’on en fait, tant le terme a réussi à s’imposer dans la sphère marketing. D’ailleurs on se donne souvent bonne conscience en (se) disant qu’on a fait des personas.
Qu’est-ce qu’un persona ?
Si on reprend ce qu’en dit le site Définitions-marketing, on peut lire : “Un persona est, dans le domaine marketing, un personnage imaginaire représentant un groupe ou segment cible dans le cadre du développement d’un nouveau produit ou service ou d’une activité marketing prise dans sa globalité. Le persona est généralement doté d’un prénom et de caractéristiques sociales et psychologiques. Plusieurs personas peuvent être utilisés pour un même projet de développement. (…). Les personas sont, entre autres, pris en compte pour le développement des caractéristiques produits / services, pour le développement des contenus d’un site web et pour l’optimisation des parcours client.”
Comment fait-on des personas ?
On en comprend aisément l’utilité. Comme on ne peut pas parler à tous de la même manière, avec les mêmes mots, les mêmes idées, les mêmes expressions, les mêmes arguments…. on va créer des personas (des profils-types en quelque sorte), qui vont représenter les cibles de personnes que l’on veut toucher. Pour ce faire, quand on veut bien faire les choses, en général, on va se reposer sur :
– des entretiens qualitatifs.
– des questionnaires online ou offline.
– des entretiens de groupe de consommateurs.
et on va ensuite se mettre à la place de ses cibles pour se demander quels sont leurs centres d’intérêt, quelles sont leurs attentes, comment elles s’informent, quels sont leurs contenus privilégiés, quels mots clés elles utilisent… Clairement, ce n’est pas une simple catégorisation du type CSP ou de caractéristiques socio démographiques.
A quoi servent les personas ?
Ce process est essentiel et doit être piloté avec la plus extrême rigueur. En effet, de cette démarche de définition de personas, on va (selon les cas) :
– créer / modifier / faire évoluer un site Internet.
– définir sa ligne éditoriale.
– piloter sa stratégie de contenu.
– se lancer dans une stratégie inbound.
– rédiger / faire rédiger des livres blancs.
– publier des articles de blog.
– diffuser des business cases.
– mettre en ligne des vidéos.
– mettre en place un processus de marketing automation.
Tout le monde connait ou a entendu parler du concept “Garbage In > Garbage Out”. Il s’applique pleinement au cas des personas. Si on se plante dans la mise en oeuvre, si le process n’est pas bon, ce qui en ressort ne produira pas ou peu d’effet : perte de temps, perte de budget (même si on ne fait pas appel à un prestataire externe, l’utilisation des ressources internes a un coût). C’est probablement souvent ce qu’il se passe. Entre ce que je constate et les différentes études que je peux lire, on se rend rapidement compte que très souvent il n’y a pas de résultat ou qu’ils sont en deçà des attentes.
Pourquoi il y a un problème ?
Les chiffres sont éloquents : 90% des internautes font, sur les moteurs de recherche, des requêtes non brandées (sans nom de marque, de produit ou de service) tandis que 80% à 90% du trafic des sites Internet (TPE, PME, Startups, grands comptes) est brandé (lié à un nom d’entreprise ou à une marque).
C’est assez révélateur du décalage énorme qui existe entre la manière dont les internautes (particuliers ou pros) abordent Internet et la manière dont les entreprises essaient de les toucher.
Avec un tel décalage, on comprend mieux pourquoi, globalement et dans leur majorité, les responsables marketing ne sont pas satisfaits du retour sur investissement de leurs campagnes digitales.
D’où vient ce problème ?
Le fait est qu’il n’est pas suffisant de dresser des profils-types (même avec de bons process internes) pour avoir des résultats.
Je pense que la principale raison de cet écart online / offline vient de la perception qu’on a de son marché, de l’écart entre la connaissance qu’on croit en avoir et sa réalité.
Je l’ai écrit dans plusieurs articles et commentaires : la principale source d’erreur que je constate chez mes prospects vient de ceux qui me disent : “je connais mes clients”.
Les cas sont très nombreux où cette (supposée) connaissance repose sur des biais cognitifs, sur une perception basée sur quelques clients non représentatifs, sur du feeling… Mais cela vient surtout du fait que beaucoup s’imaginent que l’activité online de leur secteur est un reflet du offline auquel ils sont confrontés depuis des années.
Or, online, ce n’est pas le même marché, ce n’est pas le même fonctionnement, ce ne sont pas les mêmes acteurs, pas les mêmes concurrents, ce ne sont pas les mêmes usages ni les mêmes modes de relations aux marques ni les mêmes règles du jeu.
Offline / Online
Si on regarde plus en détails, sur de très nombreuses recherches d’internautes, on ne retrouve (dans les pages de résultats “naturels” des moteurs de recherche) aucun acteur majeur du offline. C’est clairement révélateur du fait que le processus mis en place en amont (et reposant souvent sur des personas) ne s’avère pas très efficace. C’est vrai dans l’automobile, l’assurance, les produits financiers, l’immobilier, les télécoms… Je ne vais pas continuer la liste, tous les secteurs sont concernés.
Tous les acteurs “classiques” des services et de l’industrie sont confrontés à une concurrence de nouveaux acteurs qui sont invisibles offline.
Certains ont du mal à comprendre. Un dirigeant membre du board d’un groupe majeur du secteur de l’immobilier de bureau ne comprenait pas, il y a quelques mois encore, que le site “seloger” était un de ses concurrents. A partir du moment où le site “seloger” apparait en 2° résultat sur une recherche “location de bureau” ou “location de bureau paris”, c’est un concurrent d’un acteur “traditionnel”. Il a une meilleure place, il a plus de visibilité et il capte potentiellement davantage de trafic ( minima, il en capte une partie).
Connaissance client
Cet enjeu de la connaissance client est pour moi l’une des clés des stratégies digitales, du marketing online et donc des personas.
Dans le process de définition de personas, quand les résultats ne sont pas au rendez-vous, l’erreur vient je pense du fait qu’on s’autorise à penser à la place de son client.
J’ai lu des dizaines d’articles et consulté des dizaines des sites sur le sujet, les conseils sont toujours les mêmes. Voici ce qu’on peut lire. Je reprends ici l’idée du propos et non les termes exacts, mon objectif n’est pas de critiquer ad hominem qui que ce soit, mais de ne parler que du fond du sujet :
- Mettez vous dans la peau de vos personas
- Quelles seraient les objections ?
- Que penserait-il du produit ?
- Qu’est-ce qui pourrait l’empêcher d’acheter votre produit ?
- Quelle question pourrait-il se poser ?
- Faites des enquêtes. Sondez.
- Emploi quasi systématique du conditionnel dans la description de la phase de création de personas.
Toutes ces approches peuvent être pertinentes, mais plusieurs points me gênent et font que je m’interroge sur leur pertinence :
- Rien ne dit que ces suppositions soient bonnes et correspondent à la réalité.
- Se mettre “à la place de” peut sembler pertinent, mais rien ne dit que cela correspond à l’usage que le prospect / consommateur potentiel aura devant son PC, son téléphone ou sur sa tablette quand il ira s’informer pour chercher une solution à son problème.
- J’ai toujours du mal à imaginer que parce que 2 personnes ont le même profil, elles seraient supposées avoir les mêmes besoins, les mêmes aspirations et surtout les mêmes approches pour y répondre.
- De même, j’ai du mal à imaginer que parce que 2 personnes n’ont pas le même profil elles n’auraient pas les mêmes frustrations. Car en fin de compte, ce qu’il faut c’est a minima répondre à un besoin et idéalement répondre à une frustration.
- Faire des enquêtes, rencontrer ses clients, c’est bien. Mais là encore, il y a plusieurs problèmes. Un des principaux organismes spécialisés en France me confirmait que même avec la plus grande vigilance, de très nombreuses questions peuvent induire une réponse. De plus, si la question est mal posée ou non pertinente, on en revient au “garbage in > garbage out”. Enfin, une fois encore, la réponse qu’un sondé donne à une enquête n’est pas nécessairement en phase avec son comportement quand il ira utiliser un moteur de recherche ou un réseau social pour trouver une réponse à son besoin ou trouver un moyen de régler sa frustration.
- L’activité économique online est ultra dominée par le search. Plus de 90% des expériences en ligne commencent avec un moteur de recherche. Google en a une part de marché de plus de 80%. (source : 100 statistiques sur Internet). Qu’on arrête de me dire que le search ne compte pas et qu’il ne faut pas prendre en compte les moteurs de recherche et leur mode de fonctionnement quand on veut se rendre visible online. Avant d’aller s’amuser sur Facebook (qui fausse ses résultats de visionnage : audiences gonflées Facebook) ou sur LinkedIn qui comptabilise tous les posts qui défilent sur sa page d’accueil (20 000 “vues” ne sont pas du tout 20 000 “lecteurs”) ou les vidéos dès 3 secondes de vues : préoccupez-vous de votre site, de son contenu et de son référencement. Clairement, on peut faire des dizaines d’études, rencontrer ou appeler des centaines ou des milliers d’acheteurs ou de consommateurs, un point réellement essentiel c’est de comprendre (et même de savoir précisément) ce qu’ils tapent dans leur moteur de recherche préféré pour comprendre, pour s’informer, pour comparer pour acheter. Google donnait (en partie) l’info, mais cela fait un moment que c’est terminé. Nous c’est notre métier. On a bossé des heures, des jours, des semaines pour trouver le moyen de récupérer cette info qui aujourd’hui vaut de l’or. Cela n’a rien à voir avec les infos gratuites obtenues avec les outils de Google (trends ou l’outil de planification des mots clés) , Answer the public, ubersuggest and Co).
- Un dirigeant du BtoB se plaignait il y a quelques mois sur LinkedIn que les professionnels ne s’intéressaient pas assez à une de ses spécialités. Son entreprise, sur les recos de son agence a mis en place une stratégie d’éducation du marché pour faire comprendre l’importance du sujet. Problème, c’est juste une question de sémantique. Il y a une demande, importante, sur le marché pour le service en question. La stratégie déployée online ne permet simplement pas à cette entreprise de toucher sa cible sur le sujet. La réponse apportée par l’entreprise, avec des professionnels qui “connaissent leur secteur” est en profond décalage avec les usages du marché. Conséquence : malgré ses lourds investissements, l’entreprise ne peut espérer toucher que 1.67% de son marché. Pour une simple question de sémantique, et pour avoir trop cru connaître ses clients (186 fois plus efficace sans 1€ de plus).
- J’ai aussi rencontré un prospect qui s’est retrouvé à investir pour toucher une cible potentielle de 10 visiteurs par an alors qu’il aurait pu (avec un changement extrêmement simple et le même investissement) toucher une cible de 760 personnes par mois. Il n’a donc touché que 0.11% de sa cible (https://business-on-line.fr/2018/04/25/marketing-digital-10-visiteurs-an-760-mois/).
- Et je ne parle pas de l’émergence prochaine de la recherche vocale. Dans quelques années elle sera probablement majoritaire. Aujourd’hui, c’est la première page qui compte. Demain ce sera les 3 premiers résultats, selon Olivier Andrieu, l’une des principales références du search en France. Pourquoi dit-il cela ? Selon les études qu’il mène, le résultat “vocal” vient toujours d’un des 3 premiers résultats du SEO.
Conclusion
En termes de prestataire / agence / conseil sur les sujets digitaux, vous pouvez trouver tout type de fonctionnement et d’approche. Que ce soit pour le SEO, les ads, les réseaux sociaux, le développement de site, la leadgen… l’offre est large et pas nécessairement facile à décoder pour un non initié.
Il y a , heureusement de nombreux acteurs qui font un très bon travail, avec des approches différentes et de très bons résultats. Mais on trouve aussi beaucoup de non qualité et de bullshit. Je n’ai aucune certitude sur notre approche, juste de très fortes convictions.
Si vous voulez un premier aperçu : 0642673043 / cyril.bladier@business-on-line.fr