Quels enjeux marketing pour les écoles de commerce françaises à l’heure de la Covid ?
Les écoles de commerce ont France sont soumises à différentes pressions : financières, concurrentielles, recrutement, sélectivité, place des étudiants sur le marché du travail, classement internationaux… Chaque école de commerce est en plus confrontée depuis quelques mois aux répercussions de la COVID. Eléments d’analyse et pistes de réflexion.
Avant de lire cet article
- Tous les chiffres présentés dans cet article viennent d’outils Big Data qui crawlent le web en continu puis stockent et analysent des petabytes (1 Petabyte = 1 million de Go ou 1 milliard de Mo) de données. Ces données ne sont évidemment pas aussi précises que celles que chaque propriétaire de site possède pour ses propres actifs digitaux.
- Cet article n’a pas la prétention d’aborder tous les sujets marketing ni digitaux des écoles de commerce. Il y a nécessairement un choix, un parti pris et une subjectivité.
Contexte local des écoles de commerce : Finances / attractivité / sélectivité / adaptabilité
Les écoles de commerce sont soumises depuis plusieurs années à de fortes pressions qui les obligent à profondément évoluer et ceci indépendamment de la situation conjoncturelle que nous vivons depuis 1 an. Parmi celles-ci, on retrouve par exemple :
- Baisse des ressources financières via les CCI pour les écoles consulaires suite aux récentes réformes fiscales. Et nécessité conséquente pour ces écoles de changer radicalement de business model, devant passer d’une économie de subvention à une économie de marché. Avec toutes les implications que cela engendre en termes de stratégie, mais également d’organisation et de profils de collaborateurs.
- Arbitrages entre qualité et sélectivité. Les écoles ont besoin de ressources donc de frais de scolarité mais elles aussi besoin de maintenir un niveau de sélectivité pour préserver la valeur des diplômes. Doivent-elles augmenter les promotions et accueillir toujours plus d’étudiants pour optimiser les recettes ou rester sélectives quitte à ne pas remplir les promotions et à baisser leurs recettes ? Un récent article du Nouvelobs pose la question et indique par exemple que de nombreux bachelors ont un “taux d’accès supérieur à 75%”.
Un article publié dans la HBR par 2 collaborateurs de ManpowerGroup note à ce propos que “la plupart des diplômes de l’enseignement supérieur ne préparent pas suffisamment bien les étudiants au marché du travail et, à propos du diplôme d’études supérieures, que “sa valeur ajoutée diminue à mesure que le nombre de titulaires augmente”. Jusqu’où ne pas aller trop loin donc dans l’acceptation des étudiants ?
- Une concurrence de plus en plus globale que ce soit pour attirer les meilleurs étudiants ou les meilleurs professeurs.
- Des étudiants qui apprécient les intervenants du monde professionnel mais des écoles qui ont besoin de professeurs qui font de la recherche et qui publient pour monter dans les classements internationaux.
- Une exigence croissante sur les profils des dirigeants des écoles et des revenus à la hausse.
- Un manque de préparation des diplômés au monde professionnel. Depuis plusieurs années, les rapports “Future ok work” de McKinsey font le constat de manque de préparation des futurs diplômés au monde professionnel (notons cependant que ces rapports ne se limitent pas aux écoles de commerce, dont il est question ici).
- Spécificité unique du marché français des classes prépas dans un modèle international de type bachelor / master. Ce qui amène les étudiants qui suivent ce modèle à quasiment être diplômés avec stages quand les autres intègrent seulement une Grande Ecole en 1ère année.
Sélectivité des écoles de commerce en France
Un élément est révélateur de l’importance d’accueillir davantage d’étudiants : le nombre de places au concours d’entrée. Il ne cesse de croître. De très nombreux campus se sont ainsi nettement agrandis ces dernières années.
Si on regarde quelques chiffres de plus près, les 5 premières écoles de commerce proposent :
Sources : https://misterprepa.net/concours-2021-combien-de-candidats-pour-combien-de-places/ http://bloom6.free.fr/annexe.html
Soit 320 places de plus dans le Top 5 en 7 ans. Quasiment l’équivalent d’une promotion en plus pour le TOP 5.
La bonne nouvelle, c’est que cela permet au 2 000° meilleur étudiant de classe prépa d’intégrer une école du Top 5 alors que ce n’était pas possible il y a encore 7 ans.
Cela dit cette augmentation de taille des promotions se confronte à une réalité opérationnelle très concrète : les limites de capacité des salles.
Dans le même temps que les tailles des promotions augmentent, des écoles ne font plus le plein : 97% de remplissage et 8 écoles qui ne “remplissent pas” (https://www.letudiant.fr/educpros/actualite/sigem-2020-un-taux-de-remplissage-de-97-8-ecoles-ne-font-pas-le-plein.html).
C’est une problématique qui n’est pas / plus conjoncturelle puisqu’on retrouve les mêmes constats en 2015/2016 (https://www.letudiant.fr/educpros/actualite/sigem-2016-huit-ecoles-de-commerce-ne-font-pas-le-plein.html)
et même en 2012 (https://www.capital.fr/votre-carriere/ces-ecoles-de-commerce-qui-ne-remplissent-pas-leurs-amphis-744422).
Ce constat est posé sans que de réelles explications ne soient apportées.
Ces sujets, à l’interconnexion entre finances, sélectivité et adaptabilité au marché du travail sont particulièrement sensibles. Une école aujourd’hui doit arriver à un équilibre entre ces 3 dimensions, au risque de perdre en légitimité et d’être dégradée dans les classements.
Concurrence internationale : concurrence mondiale pour les business schools
La pression internationale vient se greffer sur ces tensions locales. En effet, les écoles de commerce évoluent aujourd’hui dans un contexte mondial et ce à plusieurs niveaux : recrutement des professeurs, recrutement des étudiants, opportunités de parcours internationaux proposées aux étudiants et donc attractivité….
On note 2 types de stratégie sur ce point : l’ouverture / création de campus sur d’autres territoires (Skema, INSEEC U, Toulouse BS, EM Normandie, ESCP Europe, Dauphine …) et le développement de partenariats (Audencia, Neoma…).
Impacts de la Covid sur les écoles de commerce françaises
Les écoles françaises ont beaucoup joué la carte de l’international. Avec la Covid, les écoles ont dû suspendre les échanges internationaux. Dans le même temps, les partenaires n’envoient plus leurs étudiants en France. Ce modèle et son adaptation à la nouvelle donne “Covid” va nécessairement être questionné dans les mois à venir, notamment pour les échanges hors Europe. De fait, celles qui ont fait le choix de partenaires non européens sont plus touchées.
Autre contrainte : tous les partenaires ont des quotas et, assez logiquement, les étudiants choisissent les mêmes écoles européennes donc la pression et la concurrence entre étudiants est à son maximum.
Il a également pour effet d’accroître la pression exercée par les formations en ligne, les Mooc, les Ed Techs et les offres de formation de plateformes telles que LinkedIn Learning par exemple.
La marchandisation de la connaissance est très clairement en pleine accélération.
Selon le dernier rapport (octobre-novembre 2020) de l’EFMD, le premier impact de la crise sur les business schools est financier :
- 43% des écoles ont une baisse de CA.
- 29% ont une baisse d’étudiants.
- 54% relèvent une baisse des opportunités d’emploi.
Et
- 49% une pression sur les frais de scolarité.
En conséquence, plus du tiers d’entre elles se sont davantage concentrées sur leurs marchés locaux.
Selon ce rapport, le principal challenge interne a été de devoir créer les conditions d’un enseignement “remote”, d’autant plus “challengeant” que tous les étudiants n’ont pas accès aux technologies nécessaires.
Parmi les challenges externes clés : le recrutement d’étudiants internationaux et la mobilité des étudiants (limite des déplacements internationaux, quarantaines…).
Les principaux scénarios dans cette situation :
- Adapter les business models, disruption (73% des écoles).
- Enseignement digital (60).
- Plus de collaboration pour 91% mais aussi une concurrence encore plus forte pour 90%.
- Démontrer leur impact sur le monde (66%).
Cliquez ici pour télécharger L’impact de la crise Codid-19 sur les business schools.
Le digital a donc un rôle essentiel à jouer pour faire face à tous ces challenges, notamment grâce à ses effets multiplicateurs potentiels des budgets investis en termes de ROI.
Le rôle du digital dans le marketing des business schools
Pour une école de commerce, le digital intervient à, au moins, 3 niveaux. D’une part sur le mode d’enseignement (parcours de formations, digital learning, blended learning…), et ce indépendamment de la crise COVID ; d’autre part sur le mode de présence et de participation des étudiants (présentiel / distanciel) et enfin sur la présence digitale de l’école.
Ce dernier point recouvre une très grande diversité de thématiques : recrutement de candidats, notoriété de la marque, rayonnement international, relations avec les parties prenantes, partenariats, formations 100% online (Masters et MBA online par exemple), ressources financières ….
En termes d’enseignement, digitaliser un catalogue de formations est un investissement conséquent. Un programme n’est pas un Mooc full online mais un distanciel full online ou un format hybride. Les parcours pédagogiques doivent donc être revisités et enrichis de services afin de conserver le niveau d’excellence de l’école. Pour les étudiants, l’expérience doit être similaire au présentiel. Tout cela nécessite des moyens conséquents, tant d’un point de vue technologique que par la présence indispensable de program managers afin de pouvoir palier immédiatement à des imprévus informatiques/technologiques. Les locaux et notamment les salles doivent aussi être équipées de technologues de pointe permettant le bon déploiement des formats hybrides sans rien perdre de la qualité de l’expérience étudiant.
Le digital appliqué au marketing des écoles de commerce
La présence digitale pour se marketer, promouvoir sa marque, rayonner, devient un enjeu véritablement stratégique. “Il ne s’agit plus d’aller assurer une présence sur un salon à Shangaï, ça on sait faire” confiait à un chasseur de têtes une dirigeante d’une école du Top 15.
On retrouve, sur le marché online des business schools, des situations de marché comparables à celles d’autres secteurs comme par exemple l’assurance, les télécoms, l’énergie ou encore l’automobile.
Comme j’ai eu l’occasion de le montrer dans de précédentes publications, d’un secteur économique à l’autre, les axes fondamentaux des stratégies digitales des différents acteurs sont très semblables et la différenciation en termes d’attractivité se fait essentiellement sur la base de la notoriété offline.
La majorité des stratégies online que l’on observe, sont en effet des stratégies de marketing push où il s’agit la plupart du temps de promouvoir sa marque par tous les canaux possibles (articles, vidéos, réseaux sociaux, publicités…). C’est effectivement une base essentielle d’une stratégie digitale. On ne construit pas sur des fondamentaux instables.
En revanche, en se limitant à un focus sur la marque, on risque de ne pas exploiter pleinement les possibilités offertes par le digital. Les parcours digitaux des consommateurs / acheteurs ne se limitent pas à la recherche d’informations sur une marque.
Dans les faits, les internautes sont la plupart du temps très neutres (en termes de marques) dans leurs recherches et la très grande majorité des requêtes faites sur des moteurs de recherche tels que Google sont non brandées, c’est-à-dire qu’elles ne contiennent aucune marque.
Avant de choisir telle ou telle école et donc s’inscrire au concours et/ou de préparer son dossier, un futur étudiant va s’informer sur
- le champ des possibles en fonction de sa série (littéraire, économique, scientifique…), de son industrie (retail, luxe, automobile…) ou de son métier (RH, marketing, logistique, finances, SI…).
- La durée des études : 3/4/5 ans ou leur format (part time / full time).
- L’accessibilité : bachelor post bac, après prépa, admission parallèle, concours, dossier…
- Les cursus internationaux.
- Les classements.
- Les salaires à la sortie et les perspectives de carrière ou d’accélération de carrière.
etc
A ce stade, la marque de telle ou telle école, n’est en général pas un sujet. Le comparatif puis le choix entre les différents campus / programmes n’intervient qu’ensuite.
Il y a donc une extraordinaire opportunité pour des écoles qui ne sont pas dans le Top 3 ou pas dans le Top 5 ou pas dans le Top 10…. de trouver d’excellents leviers de visibilité et de notoriété en adressant ces cibles aujourd’hui délaissées. Des leviers d’autant plus pertinents que leurs concurrentes sont elles aussi totalement absentes et invisibles à ce stade de recherche des internautes. C’est le déploiement d’une stratégie océan bleu : des niches avec une demande moyenne ou élevée et une concurrence plus faible.
La situation est identique qu’on parle de formation initiale ou de formation continue (Masters, MBA, Executive Education…). Les écoles sont centrées, sur la promotion de leurs marques et de leurs programmes. Alors que les premières analyses montrent qu’un étudiant veut d’abord faire un MBA avant de le faire dans telle ou telle école.
Là encore, c’est une formidable opportunité pour toutes les écoles, notamment celles dont la notoriété est moindre, de développer leur attractivité. Les fondamentaux sont là (promotion de la marque) mais au-delà, le champ des possibles reste très ouvert.
Et je ne parle ici que du marché français. Je propose un focus international dans la suite de cet article.
La notoriété des écoles de commerce (du TOP 10) en France
Indice de notoriété calculé sur la base de la moyenne des requêtes d’internautes sur les moteurs de recherche en France sur 12 mois, par rapport à la marque seule (en base 100).
Ces chiffres sont à prendre avec du recul. D’une part je n’ai pris en compte que les requêtes de marque seules (HEC et pas MBA HEC par exemple) et d’autre part, certains termes recouvrent plusieurs réalités (dauphine par exemple).
Concurrence inter écoles de commerce
Pour chaque école j’indique le concurrent N°1 ou N°2 en termes de positionnement. La concurrence est ici évaluée par le nombre de mots clés en commun pour les lesquels les sites sont positionnés dans les 100 premiers résultats sur les moteurs de recherche.
La présence digitale internationale des écoles de commerce françaises
A noter que pour HEC, sur le marché US, il y a potentiellement une partie du trafic qui est liée à HEC Montréal.
A l’exception des 3 parisiennes, la présence digitale internationale des autres écoles analysées, reste relativement faible. En partie du fait d’un manque de notoriété. Il y a heureusement des solutions et des leviers à actionner pour y remédier, mais ils semblent encore peu activés à ce jour.
La situation est paradoxale. D’une part la demande à l’international est très vaste dans la mesure où elle vient d’une très grande diversité de pays. En revanche, dans chaque cas pays la demande locale pour l’une ou l’autre école reste très faible. A chaque fois ce ne sont que quelques dizaines ou centaines de demandes par mois. Conséquence probable du manque de notoriété : si la marque est peu connue, personne ne la cherche.
Or, à l’international comme en France, la stratégie digitale choisie par les écoles de commerce repose fortement sur la mise en avant de la marque.
Ce n’est pas spécifique à cet univers. C’est une pratique très répandue et qui reste majoritaire dans de nombreux secteurs :
Priorité 1) La marque
Priorité 2) La marque
et
Priorité 3) La marque.
La marque est un fort levier d’attractivité dont on ne peut se passer. On sait tous que certaines marques d’écoles ont davantage de poids sur un CV. Une marque forte est un gros avantage. Notamment dans le marketing offline. En revanche, en ligne plusieurs études montrent que les internautes vont utiliser des moteurs de recherche pour s’informer et sont donc majoritairement neutres dans leurs requêtes ; notamment en début de parcours d’achat. La marque n’intervient en général qu’en fin de parcours, au moment de comparer des offres, de choisir ou d’acheter. Les requêtes sans marque ont donc un volume de recherche beaucoup plus important. En les ciblant, on peut toucher une audience plus large.
Si on parle marketing, la taille des segments de demande n’a rien à voir avec le niveau de concurrence et, c’est contre intuitif, mais la concurrence entre annonceurs n’est pas non plus liée au volume de demande. Souvent on observe même une concurrence plus intense alors que la demande est faible et une concurrence faible (voire nulle) sur des segments de marché où la demande est élevée. Ce n’est pas étonnant sur un marché où les annonceurs se concentrent sur la promotion de leur marque que sur l’écoute des clients.
Illustration chiffrée
Les chiffres sont clairs (si on se base sur la 1° et la 10° école du classement 2021 des meilleures écoles de commerce, sur la base d’une recherche Google en navigation privée sur Firefox) :
Executive MBA : 1 000 demandes par mois en France.
Executive MBA HEC : 320
Executive MBA neoma : 10
C’est très logique : la demande générique est en général bien plus élevée que la demande pour une marque précise. Pourtant 2 écoles seulement sont visibles dans les premiers résultats sur une recherche executive MBA.
Et ce n’est qu’un exemple, mais on retrouve la même situation sur des recherches de :
- Formation continue. 12 000 demandes par mois, la 1° école du top 10 est en 42° position.
- Ecole de commerce. 22 300 demandes par mois, la 1° école du top 10 est en 3° page.
- Classement école de commerce. 33 100 demandes par mois, la 1° école du top 10 est en 6° page. Pourtant un tel niveau de demande mensuelle est une belle opportunité de visibilité pour une école qui n’est pas dans le Top 5.
Ce n’est pas qu’un sujet technico-geek de SEO. Il y a de réels enjeux en termes de visibilité, de trafic, de reconnaissance, mais aussi de connaissance et de compréhension des attentes et des besoins des cibles qu’on veut toucher puisqu’elles si elles vont utiliser un moteur de recherche, c’est pour trouver des réponses aux questions qu’elles se posent et pas uniquement pour faire une demande de formulaire d’inscription.
C’est encore plus vrai pour l’international. Le challenge y est très complexe :
- il faut être présent dans de nombreux pays : lesquels prioriser ? Comment obtenir et maintenir une bonne présence en ligne compte tenu des conséquents investissements financiers nécessaires ?
- la concurrence est réellement mondiale. On va retrouver sur les territoires à conquérir : les français, les européens, les anglais, les américains, les asiatiques… sans compter les acteurs 100% online.
- lancer une marque ou la faire connaître sur un territoire est particulièrement onéreux alors quand il faut être présent sur tous les continents et dans 15/20/30 pays…
On constate à ce propos que les cibles internationales ne sont pas les mêmes pour toutes les écoles : chaque école cible sa zone. Et cette présence révèle parfois quelques surprises.
Skema par exemple a des campus (hors France) : en Afrique du Sud, au Brésil, en Chine et aux USA. Pourtant le trafic du site international vient essentiellement des Etats-Unis (1 campus), d’Inde (pas de campus), de France et très faiblement d’Afrique du Sud (alors que l’école y a 1 campus).
Choix des domaines des sites Internet des écoles de commerce
Certaines écoles ont également fait le choix d’avoir un domaine pour la France et un domaine pour l’international (.fr et .com ou .com et .edu par exemple). La conséquence principale en est qu’il faut ensuite gérer 2 domaines, c’est-à-dire : 2 hébergements, 2 contenus, 2 référencements…. D’autres ont un domaine global avec des sous-domaines, ce qui semble nettement plus rationnel et efficace.
Acquisition de trafic des sites Internet des écoles de commerce
Ces chiffres sont à prendre avec un peu de recul. Il faudrait faire un audit long et plus en détails pour affiner les chiffres. En effet, par exemple : esc Reims / esc Rouen ne sont pas pris en compte dans le trafic brandé de Neoma ; idem avec IEP pour Sciences Po ou les différentes appellations de Grenoble EM : gem ou ecole de commerce grenoble… En termes de trafic brandé on est donc en dessous de la réalité.
Ces chiffres sont le reflet des constats exposés précédemment : les internautes qui viennent sur le site d’une école sont en fin de parcours sur Internet. Ils ont sélectionné la ou les quelques écoles qui correspondent à leur besoin et viennent chercher plus d’informations ou télécharger une plaquette ou remplir un formulaire. La part du trafic liée au haut de l’entonnoir (au stade où l’internaute commence à faire ses recherches) reste particulièrement faible.
Qu’est-ce que le trafic direct d’un site Internet ?
Le trafic direct correspond aux internautes qui tapent directement l’adresse du site dans un navigateur ou au trafic des internautes qui auront mis un site en favori puis cliqué sur le lien correspondant.
Qu’est ce que le trafic brandé d’un site Internet ?
Le trafic brandé ou trafic avec marque est la part du trafic qui vient d’internautes qui ont saisi une requête contenant une marque ou un nom de produit ou de service.
Il vient donc d’internautes qui connaissent ou qui ont identifié la marque ; dans le cas présent : étudiants de l’école, partenaires, alumni, internautes en fin de parcours d’information et qui ont déjà fait une présélection… C’est une base nécessaire pour une stratégie online. Mais on ne touche là qu’une petite partie des internautes.
L’expérience montre que l’effet de levier réel arrive quand on sait aller chercher les internautes qui ont des besoins auxquels on répond mais ne nous connaissent pas ou ne nous ont pas identifiés. C’est-à-dire du trafic non brandé.
On l’a vu précédemment, 1 000 internautes font tous les mois des recherches “executive mba” et 10 cherchent “executive mba neoma”. Quand on cherche “executive MBA neoma”, on arrive très vite sur la page du site qui présente leur offre. En revanche, quand on cherche “executive mba”, leur offre n’est pas visible. Pourtant, le potentiel de visiteurs, donc de conversion est plus intéressant. Mieux vaut attirer 5% de 1 000 internautes que 30% de 10 internautes.
J’ai pris l’exemple de l’executive MBA et de Neoma, mais on retrouve la même situation pour de nombreux autres formats et pour toutes les écoles. Une partie conséquente de la demande leur échappe donc. Alors qu’elle reste très accessible.
Il n’y a pas de statistique sur la part du trafic direct moyen d’un site. C’est un élément important puisque c’est un reflet de la puissance de la marque : plus il est élevé, plus la marque est forte dans son domaine. Là encore les chiffres élevés sont le reflet d’accent mis sur la marque dans la stratégie marketing des business schools. Google aime le trafic direct, c’est un gage de reconnaissance, de qualité et de pertinence.
En revanche, la part parfois très élevée du trafic brandé montre que la plupart des écoles se reposent probablement un peu trop sur le levier de la marque. En tout cas, ce n’est pas 100% en phase avec le comportement des internautes. C’est donc une opportunité de croissance particulièrement forte pour les écoles.
La surprise de cette analyse vient de la part particulièrement faible du trafic venant des réseaux sociaux, surtout quand on prend en compte les investissements colossaux qui y sont faits : contenus dédiés, page LinkedIn, compte Twitter, page Facebook, chaînes You Tube, vidéos… J’ai cru comprendre que certaines écoles ont même leur studio et leur équipe de production.
On connait les limites des réseaux sociaux et, comme je l’expliquais il y a quelques mois, les marques doivent se poser la question du bien-fondé de leur présence sur les réseaux sociaux, quitte à poser la question de quitter les réseaux sociaux. On développe une stratégie de présence social media quand cela répond à une stratégie et non parce qu’il faut y être.
Autre point sur le trafic des sites, on constate très souvent, que le trafic du site d’une école vient…. de ses propres étudiants qui s’y rendent pour se connecter à leur espace en ligne. Parfois ce trafic semble être le plus important, et de loin.
On fait le même constat dans la banque ou la téléphonie par exemple : malgré les efforts marketing assez conséquents, les sites Internet restent souvent des outils de gestion de relation clients (consulter son compte ou ses factures) et non des sites d’acquisition de nouveaux clients.
Ce que font toutes les écoles de commerce
Quand on mène un audit externe comme celui-ci, même avec de puissants outils de Big Data, on peut constater des faits, mais on n’a pas nécessairement l’explication. Par exemple, si un site Internet a 80% de trafic brandé, cela peut : répondre à un choix stratégique, être un hasard, être un effet collatéral souhaité ou non des actions mises en place, être une méconnaissance de l’importance du trafic non brandé…
Aujourd’hui l’approche PUSH basée sur la mise en avant de la marque semble être la norme et la principale, voire la seule orientation stratégique online. Un peu comme si la marque de l’école était le seul critère non seulement d’information mais aussi de choix.
Comme je l’ai indiqué, cette situation n’est pas spécifique aux écoles de commerce puisqu’on la retrouve chez de nombreux acteurs dans d’autres industries. Le marketing digital est la plupart du temps auto centré et repose sur une communication très push pour rendre sa marque la plus visible possible, comme si c’était le seul critère choix des internautes.
Pubs, posts, articles, contenus, vidéos… on essaie d’être présent sur un maximum de carrefours d’audience en se disant qu’en fonction du média on devrait toucher telle ou telle cible. Et ce, même quand on prétend faire de l’inbound marketing. Le client y est rarement un sujet.
Quelles sont les pistes encore inexploitées par les écoles de commerce ?
Cette première analyse montre que la communication digitale basée sur la marque est faite par toutes les écoles et qu’elle donne des résultats sur le marché français. En revanche, le potentiel reste important à l’international. Le Push peut donc être probablement encore amélioré mais ce n’est là que se situe, je pense, le principal levier de croissance et de développement.
En revanche, l’approche PULL, qui repose sur la demande et non sur l’offre semble ne pas être encore mise en place et le potentiel de croissance, pour ne pas dire de disruption est réel.
Au-delà des notions Push / Pull qui relèvent essentiellement du marketing offline, c’est surtout les approches “customer centric” qui ne sont pas encore déployées.
Au risque de me répéter, les écoles consacrent l’essentiel de leurs efforts à essayer de faire en sorte que leur communication de marque touche un maximum de personnes en communiquant sur les espaces digitaux où elles pensent toucher leurs audiences.
Très peu d’école, ont une approche différente et néanmoins complémentaire consistant à comprendre les besoins et surtout les problématiques de leurs cibes.
Il y a 2 intérêts à le faire :
- Beaucoup plus de proximité avec les non clients.
- Quasi absence de concurrence étant donné qu’aucune école n’a (a priori) mis ces approches en place.
Pourtant, on l’a vu précédemment, c’est là que se situe l’essentiel de la demande. En ne s’attaquant pas à ces segments de marché, on ne touche qu’une petite partie de son audience potentielle et on laisse donc les clients potentiels aller ailleurs.
La bonne nouvelle, c’est que ces stratégies sont aujourd’hui accessibles. Il est possible de développer une réelle et profonde proximité clients en étant au cœur de leurs problématiques.
Cela ne se fait pas en un claquement de doigts, cela demande un peu de temps et d’expertise, mais c’est une réelle opportunité de faire la différence et de mettre en place une stratégie océan bleu digitale.
La stratégie océan bleu est une stratégie d’entreprise exposée par 2 chercheurs de l’INSEAD qui indique que le meilleur moyen de générer croissance et profits est de créer une nouvelle demande dans un espace stratégique non contesté.
La stratégie océan bleu digitale est une adaptation de cette stratégie au monde online. Elle consiste, à identifier des segments de marché online sur lesquels la demande est relativement importante et le concurrence faible ou modérée.
Il est évident que la taille des segments est à rapprocher du domaine d’activité et des produits ou services concernés. Entre produits de commodité ou de consommation courante ou produits nécessitant un investissement conséquent, les référentiels et les échelles ne sont pas les mêmes.
C’est une démarche très analytique, qui permet non seulement de cartographier un marché et de le segmenter par rapport à la demande mais aussi de savoir quels sont les segments à privilégier en fonction de l’intensité concurrentielle.
Si l’entreprise doit se positionner pour des raisons stratégiques, sur un marché très concurrentiel, l’approche océan bleu permettra d’identifier les meilleurs leviers à actionner.
On sait à l’avance, quels sont les efforts à fournir (humains, financiers, temps nécessaire) pour avoir une chance d’obtenir des résultats et on peut savoir à l’avance si une opération marketing a une probabilité plus ou moins forte d’avoir des résultats.
Pourquoi et comment une approche digitale différente peut changer la donne
On l’a vu dans cet article, les business schools françaises ont peu ou prou la même manière d’aborder leur présence digitale :
- des fondamentaux forts qui se concentrent sur la marque. Donc des bases solides, c’est essentiel et très positif.
- Une mise en avant des programmes des écoles.
- Un énorme potentiel de croissance en France et à l’international en passant d’une approche universellement PUSH (centrée sur la marque) à une approche PULL (centrée sur les problématiques clients) et ce avec plusieurs avantages : nettement moins de concurrence et un alignement avec les besoins et les attentes des futurs étudiants. Ce n’est pas qu’il faille tout faire par rapport à eux mais on a plus de chances de les toucher en allant sur leur terrain plutôt qu’en attendant qu’ils viennent sur le nôtre.
- La data qui, si on sait où et comment la récupérer, la traiter et l’analyser est un véritable “game changer”. Elle permet en effet de disposer d’un niveau de connaissance client que les concurrents n’auront pas et qui permet également de corriger les biais cognitifs issus du offline en s’attaquant au offline.
- Un opportunité grâce à la data, de se différencier et de sortir du lot, tant sur le marché français qu’à l’international. C’est une opportunité d’avoir une approche différente, une segmentation basée sur la demande réelle des cibles que l’on veut adresser en complément d’une approche basée sur des personas socio démographique et enfin un véritable levier (notamment par rapport aux capitaux investis) en détectant et en adressant des océans bleus.
N’hésitez pas à commenter pour prolonger la discussion. On peut aussi échanger en 1TO1 en prenant directement rendez-vous ici : https://calendly.com/cyrilbladier/strategie-digitale